Pratiques et usages de l’autobiographie raisonnée

Sous la direction de Jean-François Draperi (2017), L’autobiographie raisonnée. Pratiques et usages, Presses de l’économie sociale.

4ème de couverture

L’autobiographie raisonnée est un exercice inventé par Henri Desroche (1914-1994) au cours des années 1970 en vue de soutenir des adultes s’engageant dans un cursus de formation supérieure. Le succès de cet exercice a incité de nombreux acteurs sociaux à le pratiquer pour d’autres fins et dans des cadres professionnels multiples. Une formation spécifique a été conçue par Jean-François Draperi au Centre d’économie sociale (Cestes) du Conservatoire national des arts et métiers (le Cnam). Elle est délivrée chaque année depuis 2005. Des stagiaires qui ont suivi cette formation et initié de nouvelles applications de l’autobiographie raisonnée se rencontrent depuis trois ans au sein de l’association Acte I (Acteurs, chercheurs, territoires d’économie sociale). Ce livre rend compte de ces pratiques à partir de la présentation et de l’analyse de dix expériences. Les usages présentés sont multiples : organisation collective du travail, valorisation des compétences, formation supérieure, réinsertion professionnelle, orientation, réorganisation institutionnelle. Ces usages ne sont pas sans transformer la pratique originelle. L’ouvrage donne à voir ces transformations et l’intérêt de l’autobiographie raisonnée pour l’accomplissement personnel comme pour fonder une économie humaine.

Extraits

« Conclusion : un hexagone d’interfaces

Au terme de ce rapide parcours théorique, nous pouvons conclure que l’autobiographie raisonnée partage des traits communs avec l’auto/bio/graphie philosophique de Gusdorf, avec l’autobiographie littéraire théorisée par Lejeune et l’écriture lyrique, avec les mémoires, et le témoignage, avec les sciences sociales et les récits de vie et avec les approches analytiques et psychosociologiques.

L’autobiographie raisonnée est en effet :

  1. une pratique éducative d’autoformation fréquemment réalisée dans un cadre institutionnel,
  2. un recueil de données inédites pour une hétéro-formation en sciences sociales,
  3. un exercice littéraire,
  4. une conduite philosophique, 
  5. une histoire alternative ou complémentaire à l’histoire officielle,
  6. l’établissement de faits susceptibles de fonder le droit,
  7. une anamnèse découvrant un impensé et fondant une construction identitaire.

La multiplicité de ses facettes permet de comprendre à la fois l’apparente simplicité de l’autobiographie raisonnée et une réelle complexité dont sa profondeur témoigne. Cette simplicité et cette complexité peuvent être figurées par un hexagone d’interfaces.

Hexagone d’interfaces de l’autobiographie raisonnée

 

Schéma autobiographie raisonnéeTableau autobio raisonnée

Cette mise en perspective de l’autobiographie raisonnée mériterait bien entendu un travail approfondi et on peut espérer qu’il sera produit dans les années à venir par des spécialistes J’ai seulement voulu amorcer une réflexion qui la sorte de son isolement, qui pour splendide qu’il puisse être, présente également un risque de marginalisation, dans laquelle l’autobiographie raisonnée est depuis sa conception et qui peut se conclure par un enfermement fatal ou, pour le moins, nuisible à sa compréhension et à la stimulation de nouvelles pratiques.  Au-delà de cette mise en scène qu’est-ce qui spécifie l’AR ?

Parmi les nombreuses réponses possibles, l’une pourrait être celle-ci : l’autobiographie raisonnée prend acte de l’inachèvement de l’homme, selon le terme de Georges Lapassade. Si « l’homme est ce qu’il se fait lui-même » comme le dit si bien Jean-Baptiste André Godin, alors l’autobiographie raisonnée est l’une des conduites qui lui permettent de se faire lui-même, de devenir ce qu’il est. Car elle affirme la possibilité pour chacun de découvrir sa propre histoire, non comme réalité objective mais comme interprétation, toujours en sursis, d’un parcours.  Les récits de vie, les autobiographies ‘classiques’, les mémoires, les témoignages, constituent, pour l’essentiel, leur propre fin. Loin d’être une fin, l’autobiographie raisonnée est un départ vers soi-même via l’autobiographie et vers les autres via l’action collective. La réflexion autobiographique et l’action collective se constituent réciproquement pour former ensemble la recherche-action coopérative, lieu où s’interpellent formation personnelle et transformation sociale. »

Pour commander ce livre, nous vous invitons à vous rendre sur le site des Éditions REPAS